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Liesbeth Homans, femme forte de la N-VA qui considérait le drapeau belge comme un “chiffon”: “Je ne suis pas la plus grande féministe”
Femme forte de la N-VA pendant une décennie, Liesbeth Homans revient sur la création du parti nationaliste.
En 2019, Liesbeth Homans prêtait serment comme la première femme ministre-présidente de Flandre. Dans la foulée, lors d'une séance photo, elle qualifie le drapeau belge de "chiffon". Une injure qui, malgré des excuses, reste attachée à l'image de celle qui fut, pendant une décennie, la femme forte de la N-VA.
Militante de la première heure et inséparable de Bart De Wever, celle qu’on surnommait la "Thatcher de Wilrijk" a gravi les échelons parallèlement à l’ascension du parti. Au sommet de sa carrière en 2014, l’Anversoise décrochait plus de 160.000 voix. Aujourd’hui, le parti propulse de nouveaux visages. Au perchoir, la présidente du Parlement flamand observe, se souvient… et n’a pas rangé sa langue dans sa poche.
Pour La Dernière Heure, elle livre une de ses rares interviews en Belgique francophone.
Première femme à avoir été ministre-présidente en Flandre en 2019. Un honneur?
"Je ne suis pas la plus grande féministe au monde. Il faut la femme ou l’homme approprié à la bonne place. J’ai beaucoup de respect pour les combats des femmes qui ont lutté pour des places éligibles. Mais en 2023, en tant que femme dans une région prospère comme la Flandre, on n’a pas à se plaindre. Fière d’avoir été la première ministre-présidente ? En tant qu’historienne, oui. De cette manière j’entrerai aussi dans les livres d’histoire."
Votre plus beau moment en politique?
"Quand j’étais ministre, j’ai pu libérer des budgets supplémentaires pour les logements sociaux. J’ai moi-même grandi dans un logement social. J’ai vu ô combien c’était un tremplin. Si notre maman avait dû dépenser davantage en loyer, la vie aurait été impossible pour elle."
Votre enfance a été compliquée?
"Ma maman s’est retrouvée seule avec trois filles, de neuf, douze et quinze ans. J’étais celle du milieu. Le père a disparu. Ma mère a donc dû faire des doubles shifts et s’est tuée au travail pour nous, dans le secteur du nettoyage. Un travail physiquement très lourd. On ne s’est jamais plaint car on savait que notre mère faisait tout ce qu’elle pouvait. J’ai commencé à travailler dès mes 15 ans. Dès mes 18 ans et durant mes études, j’avais un full-time chez Delhaize."
Des circonstances qui ont conditionné votre engagement politique?
"Mmh, non. J’ai été ministre de la Lutte contre la pauvreté et présidente de CPAS à Anvers. Je voyais beaucoup d’allocations données à des jeunes de 18 ans. Mais jamais je n’ai pensé : ‘ha moi, j’ai dû travailler, faites de même !’ Ce n’est pas parce que j’ai fait quelque chose que j’attends que tout le monde le fasse. Mais par contre, j’aimerais que mes enfants fassent l’effort, car ils grandissent dans un tout autre environnement que moi. Ils jouent au basket-ball à un haut niveau. Mais j’aimerais bien qu’ils travaillent aussi. Ne serait-ce qu’un peu, pour apprendre la valeur de l’argent. Mais ils devraient alors mettre de côté le sport."
On vous a surnommé "la Thatcher de l’Escaut". Vous aimez l’appellation?
"Quand on voit tout ce que Thatcher a pu réaliser pour son pays, je ne trouve pas ça trop mal. Bien sûr, tout n’a pas été bien, mais c’est toujours le cas en politique. Négatif ce surnom ? Non ! Mieux vaut une femme forte qu’une femme faible."
Retour en 2018. Votre ancienne relation avec Tom Meeuws, actuel échevin socialiste à Anvers, a défrayé la chronique en Flandre. Comment avez-vous vécu cela?
"Du jamais-vu ! Ce n’était absolument pas pertinent. Tout le monde était au courant déjà. Cette histoire datait de 2013, Meeuws n’était pas encore en politique. Je n’avais rien fait de mal. J’ai le droit de tomber amoureuse. Si après la personne devient candidate pour Vooruit, peu importe. Ma vie privée a été jetée dans la rue sans aucune raison."
Lors d'un shooting, vous avez qualifié le drapeau belge de "vod", à savoir "torchon" ou "chiffon". Des regrets?
"Oui, je n’aurais pas dû dire ça. Ce n’était pas mon propos le plus intelligent. C’est à remettre en contexte, dans l’euphorie du moment. Je venais de prêter serment et on prenait une photo. J’ai vu le drapeau sur le cabinet, alors qu’habituellement, il n’est pas là. Oui, c’était bête. Ce n’est pas parce que je ne me sens pas Belge que d’autres gens ne peuvent pas, eux, se sentir belges. J’ai blessé certaines personnes en disant ça, et ce n’était absolument pas volontaire."
Vous sentez-vous surtout flamande, belge…?
"Anversoise, car j’y suis née, y ai grandi et y habite. Puis flamande, car je suis flamingante et, pour moi, la Flandre est beaucoup plus importante que la Belgique."
Pourquoi cette agressivité de la N-VA à l’encontre des francophones?
"L’inverse existe aussi. Je trouve les francophones très sympathiques. Mais quand on regarde les résultats électoraux, la différence est grande. En Wallonie, cela va de la gauche à l’extrême gauche. Chez nous, de la droite à l’extrême droite, et un peu de centre. Comment peut-on réconcilier au fédéral le vote des Wallons et le vote des Flamands ? Dat gaat gewoon niet ! La Belgique est juste la somme de deux démocraties. Quand on dit qu’on veut plus de compétences et le confédéralisme, c’est aussi une bonne chose pour les Francophones, qui pourront aussi mener les politiques qu’ils veulent mener. Je trouve légitime que le PS dise ne pas vouloir limiter les allocations de chômage dans le temps. Pas de problème, mais la Flandre peut aussi légitimement dire qu’elle n’est pas d’accord."